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Inscription : sam. oct. 24, 2009 10:38 am Messages : 7119
Localisation : Somme
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Bonjour à tous, Je tiens à remercier très chaleureusement Monique BOURGEOIS-MARTELLI, qui m’a très gentiment transmis les pages consacrées au 25e B.CA. par le Lt-Col. ROUCAUD, article retrouvé dans les papiers de son père. Cordialement Eric 25e B.C.A. Combats d'Hattencourt et de Liancourt-Fosse et de FonchesLe 25e B.C.A. (Bataillon de Chasseurs alpins) de la région de Menton /Roquebrune-Cap-Martin, sous les ordres du Chef de Bataillon Roucaud, fait partie de la 6e Demi-Brigade de Chasseurs alpins (1) rattachée à la 29e Division d’Infanterie alpine. Le 31 mai 1940, le Général Gérodias assigne à la 6e Demi-Brigade, placée en seconde ligne, la mission de garder et de tenir à tout prix Liancourt-Fosse. Ce village est le dernier obstacle avant Roye. Le général Frère, commandant la VIIe Armée l’a bien compris.« Si […] Péronne continue de tenir une place de premier plan dans la pensée du commandant de l’armée, c’est […] parce que le général Frère s’attend à en voir surgir le plus fort de l’assaut sur ses positions. C’est Roye, nœud des communications du Santerre, premier objectif capital de ce débouché, qu’il faut conserver en y mettant le prix. Roye devient donc, dans cette période et sera pendant la première phase de la bataille, la nouvelle entité géographique en laquelle se synthétiseront les préoccupations du général Frère… » (2) La veille, le 30 mai, le 25e bataillon « arrive dans la Somme à Hattencourt qu’il met en état de défense, et, le 2 juin, reçoit mission de constituer un barrage antichars à hauteur du Ru d’Ingon. En arrière et à 9 kilomètres environ des premières lignes de la 29e Division au contact sur la Somme et en liaison à gauche avec la 19e Division, ce barrage, formant crochet défensif, doit interdire les principales voies d’accès, couvrir et tenir le nœud de communications de Liancourt. Le 25e Bataillon de Chasseurs alpins se voit ainsi confier une mission capitale : la couverture du flanc gauche de la division. L’existence dans sa zone de grandes pénétrantes – la route nationale de Péronne à Roye, la route et la voie ferrée de Chaulnes à Roye – le maintien par l’ennemi sur la rive gauche de la Somme d’une tête de pont au sud-ouest de Péronne, en augmentent encore l’importance. Aussi, la 6e Demi-Brigade établit-elle son P.C. à Liancourt et le bataillon à Hattencourt. Ordre est alors donné à ce dernier d’organiser en points d’appui fermés antichars les villages d’Hattencourt, Fonches-Fonchette, Curchy et Liancourt et de les défendre sans esprit de recul en cas d’attaque. Ne disposant que de moyens de fortune, il ne reçoit, malgré toutes ses demandes, ni mines, ni engins antichars, ni matériel, ni munitions supplémentaires : la valeur de l’organisation s’en ressent d’autant plus que, pour la défendre, les effectifs, bien insuffisants, ne permettent pas de constituer de réserves. Chaque village est immédiatement occupé et les travaux activement poussés. L’énergie de tous tend à une réalisation rapide : la situation, déjà grave, peut bien vite évoluer et le temps est compté. Du point de vue militaire la position est assez médiocre. Les villages étendus, aux habitations dispersées construites en briques ou de pisé, n’offrent qu’une protection relative. Les arbres ou vergers qui les entourent rendent la surveillance rapprochée difficile et sont bien perméables. Tout autour, les étendues sans relief des plateaux du Santerre. Cette campagne, d’apparence déserte, ne présente que d’assez rares couverts, sauf près des villages et le long du petit vallon boisé du Ru d’Ingon, étroite coupure formant sur la droite du bataillon un bien faible obstacle. Dans cette région d’accès facile où, de tous temps, les armées se sont affrontées pour disputer les routes menant au cœur de notre Pays, rien ne contribue donc à renforcer la puissance de l’organisation en cours et tout rend plus difficile encore l’interdiction d’intervalles déjà considérables : le bataillon n’a-t-il pas un front de plus de 6 kilomètres à défendre et ses points d’appui ne sont-ils pas distants de près de 3 kilomètres ? Le 4 juin, en fin d’après-midi, les Chasseurs, pleins d’ardeur, poursuivent fiévreusement leurs travaux, partout en fort bonne voie ; ils comptent les mener à bien, rien ne permettant d’envisager une très prochaine action de l’adversaire. Mais la nuit est très agitée : de violents tirs d’infanterie et d’artillerie ne cessent de se faire entendre ; un message, laissant prévoir une attaque imminente, provoque, peu avant l’aube, la prise du dispositif d’alerte. » (3) Le 5 juin, dès l’aube, l’aviation ennemie engage l’action. Ses attaques se multiplient sur les positions, les postes de commandement, les communications. Une violente irruption de chars jaillit de la tête de pont de Péronne, en direction des Positions de la 19e Division qui couvre Chaulnes, et s’étendant à la 29e Division à droite, à la 7e D.I.N.A., à gauche. A 5 heures 30, l’infanterie débouche ; à 6 heures 30, tout le front de la VIIe Armée est attaqué. (4) Carte figurant dans le livre de Pierre VASSELLE, Les combats de 1940, 18 mai - 9 juin, Haute-Somme et Santerre, Ligne de l’Avre et de l’Ailette. page 61. « Le 5 juin, dès 4 heures, de nombreux avions ennemis bombardent avec acharnement tous les points sensibles. C’est le prélude de l’attaque : très violente, elle va porter son effort principal sur l’axe Chaulnes – Roye, limite entre les 19e et 29e Divisions. D’abord lointain, le feu se rapproche, toujours plus intense, et les avions, poursuivant à très basse altitude leur ronde infernale, bombardent tous les objectifs perceptibles : villages, carrefours, observatoires, P.C., points de rassemblement…, subissent leurs coups répétés. De violentes explosions déchirent l’air, des incendies s’allument, d’épaisses fumées s’élèvent de toutes parts. » (3) Dès 6 heures, en effet, les chars allemands apparaissent sur la route d’Hallu à Hattencourt et des artilleurs et sapeurs refluent de la Division voisine (5) sur les points d’appui du 25e B.C.A., où ils sont arrêtés et reformés. (6) « Dès 7 h. 30, de nombreux engins blindés ennemis, venant du Nord, débouchent de la région Est de Chaulnes, s’infiltrent un peu partout et entourent les points d’appui de gauche du bataillon, rendant les liaisons malaisées : trois heures à peine après le début de l’attaque, la situation est déjà sérieuse ! » (3) Entre 8 heures et 8 heures 30, environ 120 chars se rassemblent aux environs de Fransart et d’Hallu puis se portent entre Fonches et Hattencourt. « Peu après, ils prononcent leur première attaque sur ces deux villages, appuyés par une puissante aviation qui tient l’air sans relâche. Jusque vers la fin de la matinée ils se heurtent à l’opiniâtre résistance des défenseurs qui, pour arrêter la vague qui déferle, emploient, faute de mieux, les moyens les plus rudimentaires : bouteilles d’essence, paille enflammée, qui, cependant, font merveille. Les Chasseurs, au prix de remarquables efforts, parviennent à faire front, mettant hors de combat une demi-douzaine de chars. L’assaillant se retire alors non sans avoir incendié et désorganisé ces deux points d’appui qu’il déborde par le Sud. L’échec de cette tentative, infructueuse malgré sa violence, donne confiance et relève le moral : officiers et cadres parcourent les positions où les Chasseurs, avec une froide volonté, remettent en état leurs emplacements ; les agents de liaison font des prouesses pour relier les points d’appui au P.C. du bataillon et faire connaître au commandant que partout, tous ont le désir, en répondant coup pour coup à l’ennemi, de se montrer dignes de la mission reçue. Mais cette accalmie, mise à profit pour remettre de l’ordre, rétablir les liaisons, recompléter les munitions et rassembler les moyens de défense encore intacts, n’est, en fait, qu’une courte trêve. Vers 13 h. 30, sur tout le front, l’activité reprend avec une puissance accrue : Hattencourt, Fonches-Fonchette et Curchy subissent à nouveau les assauts furieux d’engins blindés dont la densité augmente sans cesse. Ils débutent d’abord, acharnés, sur Fonches et Fonchette. Fortement appuyés par l’artillerie et par l’aviation, les chars, comme le matin, tentent de déborder : ils se heurtent à la défense dont ils ne peuvent avoir raison. Tout est mis en œuvre, pour arrêter cette nouvelle ruée : le tir précis de l’unique canon de 25 met hors de cause plusieurs engins blindés, mais avec de si faibles moyens antichars et sans soutien d’artillerie et d’aviation, comment empêcher l’ennemi de resserrer son étreinte ? Hattencourt est ensuite pris violemment à partie : ses lisières et ses observatoires sont soumis à un feu destructeur. Une centaine de chars, avec les mêmes appuis auxquels se joignent des concentrations de « minen », ne peuvent, malgré leurs coups répétés, arriver à leurs fins. La puissance de ce feu, qui écrase, transforme ces deux villages en brasiers. La mêlée est ardente : sous un soleil de plomb, les défenseurs tiennent, environnés d’épaisses fumées qui aveuglent et suffoquent, et continuent à répondre avec leurs pauvres moyens (concentrations de mortiers de 81 et de 60, bouteilles d’essence…) sans se soucier des coups meurtriers auxquels ils sont en butte. Admirable résistance que, malgré tous ses efforts, l’adversaire ne peut surmonter. Pour en venir à bout, plusieurs groupes de chars (200 environ) se concentrent, vers 17 heures, aux alentours de ces deux points d’appui pour une attaque générale. Par un hasard providentiel, nos 155 déclenchent alors leur tir attendu et demandé à maintes reprises : bien appliqué, il désagrège les formations blindées qui refluent rapidement vers le Nord, laissant plusieurs « Panzer » sur le terrain. Heureuse intervention ! Curchy, enfin, après une forte préparation d’artillerie qui incendie le P.C. et provoque l’explosion du dépôt de munitions, est, au cours d’une lutte ardente, sur le point d’être débordé. Vers 19 heures, la garnison de ce point d’appui n’échappe à l’encerclement total que par un repli difficile : harcelée par les »Panzer » qui défilent le long des lisières de Liancourt, elle parvient, au cours de la nuit, à occuper à nouveau la partie sud du village. L’ennemi n’abandonne cependant pas tout espoir d’obtenir un succès avant la fin du jour. Avec une ténacité remarquable, il prononce, vers 21 heures, une nouvelle attaque sur Fonches pour enlever de vive force ce point d’appui, excellente base de départ pour le lendemain. Les tirs ajustés des « Panzer » provoquent de nouveaux incendies sur les lisières. Les Chasseurs ripostent avec rage ; leur feu nourri cause de nouvelles pertes dans les rangs de l’assaillant qui, à nouveau, se retire. » (3) Il est très tard ce 5 juin. Selon la relation du Capitaine allemand Von Jungenfeld, « Vers 22 heures, la brigade (Brigade blindée de la 4e Division blindée allemande) atteignait les hauteurs voisines d’Étalon. Elle essayait alors d’enlever Fonches. Mais à peine s’en était-elle rapprochée que, sous la grêle des projectiles, quatre véhicules encore étaient démolis en un clin d’œil. Les compagnies de chars lourds étaient de nouveau forcés d’intervenir. Malgré une rude attaque, Fonches, abordé seulement vers 3 heures du matin, devait pourtant résister toute la nuit. Ce fut une nuit de guerre dépassant toute imagination. On tirait par-ci, par-là. Les villages étaient en feu, projetant comme du sang sur l’horizon. La brigade blindée s’était formée en hérisson à côté de la grand’route, essayant vainement d’assurer quelques repos à ses équipages sous le feu terrestre et aérien. » (7) « Malgré la puissance de l’adversaire, le 5 juin, en fin de journée, le front du bataillon est donc intact. Mais le cercle, formé autour de ses points d’appui, se resserre de plus en plus, pour se refermer à peu près dès la chute du jour : aucun ravitaillement, ni en vivres, ni en munitions, n’est plus possible. Seule, une forte contre-attaque avec chars peut dégager le bataillon et briser la brutale étreinte en train de l’annihiler : peu avant minuit, on l’annonce pour les premières heures de la matinée. La nuit est encore fort agitée : fusillades et bombardements discontinus, fusées, bruits de moteurs décèlent l’activité adverse. A la lueur des incendies, les patrouilles du bataillon cherchent à préciser le contact ; partout, elles se heurtent à l’ennemi chez qui elles sèment un certain désordre.
Le 6 juin dès l’aube, les avions, en vagues successives, reprennent leur ronde qu’ils vont poursuivre sans relâche. Peu après, la bataille reprend intense ; terrible journée où, sans répit, le bataillon va se trouver en butte à tous les coups ennemis. Hattencourt et Liancourt supportent vaillamment le choc : malgré la puissante protection des Stukas et des 105 chenillés, aucune infiltration ne se produit. Mais, toutes liaisons coupées et à peu près encerclés, ces deux points d’appui se trouvent complètement livrés à eux-mêmes. Le moral reste cependant élevé, la confiance intacte ; la contre-attaque de chars annoncée n’est-elle pas sur le point de se produire ? Attente vaine, car bientôt, hélas ! s’évanouit ce dernier espoir. C’est par surprise que, vers 4 h. 30, les Allemands essaient d’enlever le point d’appui de Fonches-Fonchette, le croyant sans doute à bout de souffle. Ils le prennent sous un bombardement des plus violents après avoir essayé d’un ultimatum auquel est faite la seule réponse qu’il se doit. L’intensité du feu redouble, la lutte prend alors un caractère de sauvage âpreté : les Chasseurs défendent pied à pied le village en flammes dont l’ennemi, soutenu par ses Stukas et ses 105 chenillés, entreprend le siège en règle.» (3) « Le lendemain matin (6 juin), à l’aube, l’attaque de Fonches était reprise par le 1er bataillon à l’aide d’une compagnie de Fusiliers qui avait pu tout de même être amenée en renfort. Mais l’ennemi se défendait avec acharnement ; il fallait conquérir les maisons l’une après l’autre. Le combat se déroulait en corps à corps ; chaque maison était occupée et fortifiée ; de toutes les caves sortaient des coups de feu ; l’ennemi tirait même du haut des arbres. A la sommation de se rendre, l’adversaire répondait négativement et par un feu encore plus intense. Car, ici, ce sont des soldats de l’active qui combattent ; ils ne connaissent ni la faiblesse ni l’hésitation : c’était le 25e bataillon de Chasseurs alpins. » (7) « Lutte inégale et sans espoir où la garnison, faisant preuve d’un sang-froid et d’un courage admirables, va maintes fois au corps à corps dans des contre-attaques désespérées. Submergée par le nombre, neutralisée par la puissance du matériel, à court de munitions, elle succombe non sans avoir, pour se dégager, tenté l’impossible… Et, vers 9 heures, c’est le fin… Pour l’ennemi, ce succès, chèrement payé, est d’autant plus important qu’il ouvre une vaste brèche dans le dispositif du bataillon, la garnison de Curchy (Lieutenant Degas) qui, dès le lever du jour, a repris le contact, s’étant repliée à nouveau. Par cette brèche, impossible à aveugler faute de réserves, l’adversaire s’engouffre pour reporter tous ses efforts sur Liancourt et Hattencourt qui vont maintenant en supporter tout le poids. A 10 heures, l’attaque reprend avec une intensité toujours croissante. Liancourt va, à son tour, opposer une superbe résistance. Les Stukas vont et viennent, cherchant à atteindre le œuvres vives ; à terre, les chars, en nombre, manœuvrent pour déborder, soutenus par des concentrations de « minen » bien appliquées. » (3) Au cours de la journée, quatre assauts vont être repoussés. « Plusieurs assauts furieux se succèdent infructueux. Sur leurs positions incendiées, les Chasseurs combattent avec fougue et contre-attaquent sans cesse ; malgré le manque de moyens antichars et la pénurie de munitions, ils poursuivent courageusement la lutte.» (3) « Cependant, le 2e bataillon attaquait Liancourt, au Sud. Une équipe d’éclaireurs envoyée en avant avait annoncé un calme complet dans le village. Intrigué pourtant, le commandant du bataillon l’attaquait en tenaille avec deux compagnies et laissait derrière une compagnie qui, éventuellement, servirait comme groupe de choc et de réserve… Les deux compagnies annonçaient déjà qu’elles étaient arrivées sans aucune résistance jusqu’au milieu du village. Mais on se heurtait alors à une barricade. Un feu d’enfer arrosait subitement les assaillants. Les Français les surprenaient avec une grêle de plomb. Ce village était une énorme forteresse. Pas une seule maison d’où on ne tirât. Pas une seule fenêtre, soit à la cave, soit au rez-de-chaussée, d’où le feu n’apportât la mort. Il ne s’agissait d’abord que d’un tir d’infanterie. Tout à coup, des pièces antichars se mirent à tirer et démolirent immédiatement plusieurs engins de la compagnie de chars lourds. L’attaque commençait à stopper… A ce moment, se produisait une contre-attaque menée par 14 chars Somua contre lesquels les chars du bataillon entamaient une action pénible ; mais finalement fatale à 4 chars français. Liancourt, abandonné sous leur pression, tâté de nouveau sans plus de succès, est livré à la chanson impitoyable de l’artillerie ; ensuite, les stukas chantent leur air cruel. Bientôt tout Liancourt brûle de partout. Pourtant Liancourt résiste longtemps. Bientôt, le village est complètement détruit et lorsque, vers l’après-midi, l’infanterie commence l’assaut de ce village, elle trouve encore tant de résistance et de travail pénible que, à 18 heures, la 6e compagnie doit encore une fois se porter à son secours pour donner le coup de grâce à l’ennemi qui se trouvait dans le village en feu. » (7) C’est donc vers 18 heures, complètement submergé, que Liancourt est définitivement réduit au silence après une lutte dont l’issue ne faisait aucun doute. « Le sort du point d’appui d’Hattencourt ne doit pas être moins tragique. Depuis le lever du jour l’activité de l’ennemi, dont l’intensité a redoublé, fait présager une attaque en force : la chute de Fonches, assez rapidement connue, en confirme l’imminence. » (3). 10 heures. « Elle se déclenche brutale : les assauts se succèdent puissants, rapides et acharnés. Stukas, 105 chenillés, minen, concentrent leurs feux sur le village, neutralisent les lisières, incendient de nouvelles habitations qui brûlent comme des torches. Des éléments ennemis à pied, mitraillettes en main, cherchent à s’infiltrer dans les lisières Nord et Est du village. Fidèles à l’ordre formel, les Chasseurs, au milieu des fumées qui aveuglent, résistent sur place et bloquent l’adversaire. Une barricade est enlevée de haute lutte, une contre-attaque la dégage aussitôt… Vers midi, les chars, en formations massives, pénètrent dans Hattencourt où ils demeurent désormais. Après une bien courte accalmie, le combat reprend de plus belle et, vers 14 heures, l’attaque redouble, tous moyens réunis. Elle va, dès lors se développer sans arrêt avec une intensité croissante. La chaleur accablante, les incendies qui gagnent, le feu qui, de partout, s’abat sur les défenseurs, transforment le point d’appui en véritable enfer. L’unique canon de 25, replié de Fonches où il a été admirable, détruit trois nouveaux chars, en stoppe plusieurs autres… Durant un heure, c’est un combat acharné de rues et de maisons avec toutes ses alternatives ; les chars patrouillent entre les organisations et tirent à bout portant. La défense résiste sans faiblir, s’oppose pied à pied à l’ennemi et lui cause des pertes sensibles ; mais cette ruée, de plus en plus difficile à contenir, arrive à une cinquantaine de mètres du P.C. du bataillon, réduit de la défense. La situation est désespérée, l’ennemi prépare un suprême assaut. Pour essayer de sauver la garnison, qui a fait tout son devoir…» (3) « Vers 16 heures, le Commandant Roucaud jugeant la situation désespérée décide d’abandonner son point d’appui et de tenter de se replier vers Roye que l’aviation ennemie bombarde intensément. » (8) « … L’ordre de repli est donné ; il est 16 h. 30. Par petits groupes les Chasseurs, sous l’héroïque protection d’éléments retardateurs, essayent d’échapper à l’étreinte et tentent une percée en direction de Fresnoy-lès-Roye – Roye.» (3) « Le repli commence par échelon sous la protection du capitaine Lacour et des éléments de la 2e Compagnie avec le Lieutenant Bugault. Encerclés, les derniers défenseurs d’Hattencourt devaient être faits prisonniers à 18 h. Seuls, les groupes guidés par les Lieutenants Guy et Chapeleau devaient parvenir à échapper à l’étreinte de l’ennemi. » (8) Moins de 150 hommes en tout, le général Weygand parle même de moins de 125 hommes (9), en comptant les éléments de la C.H.R., devaient parvenir à rejoindre la Division pour être affectés quelques jours plus tard à ce qui restait des 24e et 65e B.C.A. « Le 25e bataillon de Chasseurs alpins est mis hors de cause. N’ayant eu, en fait, que des poitrines à opposer aux « Panzer », il a rempli jusqu’au bout la mission reçue, en résistant près de trente-six heures aux attaques furieuses et répétées d’un ennemi valeureux, supérieur en nombre et en moyens. Sublime sacrifice où, donnant le meilleur de lui-même, il multiplie les actes de courage. « Contre-attaquant dans un élan superbe à la tête de sa section sur qui l’ennemi se rue pour la quatrième fois, un officier tombe très grièvement blessé ; il se redresse, continue avec une énergie sublime à entraîner se Chasseurs et ne consent à être pansé qu’après avoir rendu compte à son capitaine. » « Un autre officier, sommé de se rendre, la situation de son point d’appui en flammes étant désespérée, après avoir opposé un refus formel, répond par un feu encore plus nourri jusqu’à épuisement complet de tous ses moyens. » « Un sous-officier, apercevant un canon de 25 sur le point de tomber à l’ennemi, affronte sans hésitation, seul et de son propre chef, un feu destructeur, se faufile entre les chars adverses, le ramène, au prix de quels efforts dans nos lignes et dirige son feu avec une telle maîtrise qu’il détruit trois chars ennemis et en arrête plusieurs autres. » « Un chasseur, au plus fort de la mêlée, se glisse à travers les décombres, bondit sur un char ennemi, arrache son fanion de commandement et le rapporte à son lieutenant. » « Un autre enfin, au cours d’une reconnaissance, s’approche en rampant, d’un char ennemi en action, lance une grenade par sa tourelle entr’ouverte, met les occupants hors de combat, sauve ses camarades sur qui se dirigeait l’engin, mais tombe, la cuisse fracassée. » (3) Parmi les Morts pour la France du 25e B.C.A. tombés au cours de cette journée, citons : ISCANIO Etienne Victorien, né le 28-06-1913 à Allouiles (83), tué au combat le 6 juin 1940 à Hattencourt. PHILIP Louis Claudius, né le 28-11-1913 à Marseille (13), tué au combat le 6 juin 1940 à Hattencourt. Ces deux soldats reposent dans la Nécropole Nationale d’Hattencourt, respectivement tombes 1153 et 1149 de ce cimetière. ISNARD François, né le 10-05-1916 à Bras d’Asse (04), tué au combat le 6 juin 1940 à Hattencourt. PETIT Antoine Auguste, né le 11-07-1913 à Graveson (13), tué au combat le 6 juin 1940 à Hattencourt. DELBOS Auguste Isidore, né le 30-07-1916 à Réols, commune de Neussac (48), tué à l’ennemi le 6 juin 1940 à Fonches. RATIER André, né le 13-08-1918 à Montpellier (34), tué au combat le 6 juin 1940 à Fonches. VIDAL Augustin Basile né à Saint-Sauveur-de-Peyre (48), tué au combat à Liancourt-Fosse. (1) La 6e Demi-Brigade comprend les 24e, 25e et 65e B.C.A. d’active au sein de la 29e Division d’Infanterie alpine, sous le commandement du Colonel Mermet. (2) WEYGAND (Général), Le général Frère un chef, un héros, un martyr, Flammarion Editeur, 1949, p. 169. (3) ROUCAUD (Lieutenant-Colonel), L'odyssée douloureuse du 25e B.C.A. (mai-juin 1940), in Revue d'Histoire militaire n° 13, 1942 (numéro spécial consacré aux Chasseurs à Pied), pages 86 à 92. (4) WEYGAND (Général), Le général Frère un chef, un héros, un martyr, Flammarion Editeur, 1949, pages 173 et 174. (5) Il s’agit d’éléments appartenant à la 19e D.I. (6) GIRAUD Henri, 1939-1940 La 29e D.I. et le 141e R.I.A. au feu, Leconte Imprimeur-Editeur, Marseille, 1941, pages 16 et 17. (7) Von Jungenfeld (Capitaine), So Kämpften Panzer, ouvrage où il relate les exploits de sa 4e Division blindée allemande. (8) GIRAUD Henri, 1939-1940 La 29e D.I. et le 141e R.I.A. au feu, Leconte Imprimeur-Editeur, Marseille, 1941, page 22. (9) In Le général Frère… op. cit. Eric ABADIE © Oise 1939 - 1945 - juin 2010
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