ROYE
CONSEIL MUNICIPAL
Le Conseil municipal s'est réuni le dimanche 29 septembre (1940) Quinze membres sur 20 en exercice, étaient présents, les cinq autres s'étant fait excuser. Avant d'ouvrir la séance, M. MERCUSOT, maire, s'exprime ainsi : "Mes chers collègues, A tous, je souhaite la bienvenue. Il est heureux que nous nous retrouvions tous les membres en exercice vivants après les événements traversés et nous pouvons nous en féliciter, certains d'entre nous ayant vécu des heures tragiques. Je ne vous ferai pas l'historique des événements. Ils sont déjà du domaine de l'Histoire, mais je désire vous parler du présent. Il y a, rentrés à Roye, 1.192 familles, 3.850 habitants sur 5.000 et dans une cité détruite, d'après l'estimation allemande, à 85 %, c'est un problème ardu de logement et de ravitaillement. La ville de Roye a dû improviser avant la rentrée des commerçants, un ravitaillement municipal, des boulangeries, des boucheries et un moulin a été remis en marche pour l'approvisionnement en farine de la population de Roye et du district. Les écoles à demi-réparées ont repris leurs cours, l'Hospice, les médecins, pharmaciens, sage-femme, sont rentrés et après avoir eu l'aide de la Croix-Rouge Belge, à qui je tiens à rendre hommage, nous avons le concours de la Croix-Rouge Française. Le gaz se réinstalle, l'eau et l'électricité fonctionnent dans une partie de la ville, le service des pompiers est assuré. Les travaux de déblaiement sont en cours. Le problème du lait est difficile et se met au point par les soins de M. le Juge de Paix. Tous les employés municipaux ont repris leur poste sauf un prisonnier. Il faut beaucoup de volonté, Messieurs, de courage et d'espoir en les circonstances actuelles. Je ne sais ce que nous réserve l'avenir, mais pour ma part et pour mener à bien la tâche qui m'incombe, je suis sûr, quoiqu'il arrive, que je tiendrai. Je formule à votre sujet et au sujet des employés municipaux, la même certitude. La ville sera défendue autant que le permettront les circonstances. Messieurs, les séances seront rares mais je me tiens toujours à la disposition des membres du Conseil pour leur fournir les renseignements qu'ils croiront devoir me demander. Je vous adresse, Messieurs, un appel en faveur des prisonniers de guerre français, aidez-les et faites les aider dans votre entourage."
Après cette péroraison, M LOUBÈRE demande à l'assemblée de lui présenter une motion et M. le Maire est invité à se retirer de la salle des séances pendant quelques instants. La motion suivante est ensuite votée à l'unanimité. "Les membres du Conseil Municipal de la ville de Roye, réunis en séance le 29 septembre 1940, à 16 heures, apprécient la conduite courageuse du maire de Roye, conseiller d'arrondissement, M. Paul MERCUSOT. Sous le bombardement du 18 mai 1940, M. MERCUSOT assure l'évacuation des habitants de la ville, des hospitalisés et du personnel de l'Hôpital, des blessés, fait ramener les morts et assure l'évacuation des archives de divers services municipaux. Du 18 mai au 5 juin, il établit la liaison avec les troupes françaises malgré les bombardements des 3 et 5 juin et du 6 juin dans la matinée. Seul dans Roye complètement évacué, sous un bombardement intense par avions, sauve, dans l'après-midi du 6 juin des bureaux de l'Hôtel-de-Ville en feu, une partie des archives municipales ; blessé à la main par un éclat de bombe, mitraillé, il quitte la ville en flammes. Rentré à Roye le premier dès le 16 juin 1940, il assure l'inhumation des cadavres de toute sorte, les premiers déblaiements, le ravitaillement et tous les services. M. le Maire continue à défendre sous l'occupation, les intérêts de la ville de Roye, martyre, détruite à 85 % d'après l'estimation allemande. Le Conseil à l'unanimité décide 1° qu'un extrait de la délibération restera affiché dans la salle du Conseil municipal de la ville de Roye. 2° qu'un extrait de la présente délibération sera adressé à M. le Ministre Secrétaire d'État à l'Intérieur, à M. le préfet de la Somme et à M. le sous-préfet à Montdidier." M. le Maire rentre en séance et après avoir pris connaissance de la motion, remercie ses collègues...
Le Progrès de la Somme, numéro 22185, 11 - 12 octobre 1940 259PER292 Archives de la Somme
Cordialement Eric Abadie
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