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MessagePublié : lun. juin 07, 2010 21:50 pm 
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Inscription : sam. oct. 24, 2009 10:38 am
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Bonsoir,
J'aimerais rendre hommage ce soir à trois aviateurs, appartenant au Groupe de Reconnaissance I/35, basé à Mantes. A bord d'un Potez 63-11, n° 827, le Lieuteant Pierre-Marie RÉGIS, officier observateur, le Sergent Marc Joanny PRINI,pilote, et le Sergent Roger Claude MATHELIN, mitrailleur. Ils ont pour mission la reconnaissance et l'observation de la progression des colonnes allemandes dans la région de Roye, en ce matin du 7 juin 1940. C'est une mission de sacrifice. Ils savent qu'ils ne pourront compter sur aucune protection de la chasse française sur zone et que la maîtrise du ciel de Picardie sera entièrement du côté de la chasse allemande.
Rien n'y fait, malgré plusieurs incidents, l'avion s'envole de la base de Mantes et met le cap sur Roye.
Au-dessus de Roye, seul face aux Messershmitt, l'appareil est une cible facile. Les trois hommes ont compris que leur fin est proche. Mais ils se battent dans un dernier baroud d'honneur. Ils endommagent ou abattent des avions ennemis avant de s'écraser dans les marais Demouy près de l'Avre.
Si les corps des sergents Prini et Mathelin sont retrouvés près de la carlingue en juin 1940, ce ne sera qu'à l'automne 40 que le corps du Lieutenant Régis sera extrait de la carlingue de l'appareil et inhumé à Roye.

Cordialement
Eric


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MessagePublié : mer. juin 09, 2010 18:04 pm 
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Bonsoir à tous,
Voici le profil du Potez 63-11 des trois aviateurs Morts pour la France à Roye (Somme) le 7 juin 1940.
Cordialement
Eric


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MessagePublié : dim. juin 13, 2010 21:20 pm 
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Inscription : sam. oct. 24, 2009 10:38 am
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Bonsoir à tous,
voici les deux citations accordées au Lieutenant Pierre RÉGIS
Cordialement
Eric

CITATION A L'ORDRE DE L'ESCADRE AERIENNE

«REGIS (Pierre), lieutenant, groupe de reconnaissance 1/35 : officier observateur, calme et réfléchi. A accompli brillamment le 27 mai -1940 une reconnaissance à basse altitude dans les lignes ennemies. Bien que son avion ait été endommagé par les tirs de la D.C.A. ennemie, a continué sa mission jusqu'au bout, ramenant les renseignements les plus précieux.
Cette citation comporte la croix de guerre avec étoile de bronze
».

Extrait du JOURNAL OFFICIEL du 8 Mars 1941

«REGIS (Pierre), lieutenant, groupe de reconnaissance 1/35 : officier observateur calme, courageux et sûr. A fait preuve des plus belles qualités d'activité réfléchie et de cœur, notamment au cours du bombardement aérien du terrain de Mantes, le 3 juin 1940. Tombé glorieusement au champ d'honneur, le 7 juin, au cours d'une reconnaissance aérienne à l'intérieur des lignes ennemies. Déjà cité.
Cette citation comporte l'attribution de la croix de guerre avec palme


J.O. du 22 août 1941 page 3544
LÉGION D'HONNEUR POUR CHEVALIER

REGIS (Pierre), lieutenant (réserve) du groupe de reconnaissance 1/35 : officier observateur calme, courageux et sûr. A fait preuve des plus belles qualités d'activité réfléchie et de cœur, notamment au cours du bombardement aérien du terrain de Mantes, le 3 juin 1940. Tombé glorieusement au champ d'honneur, le 7 juin 1940, au cours d'une reconnaissance aérienne à l'intérieur des lignes ennemies


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MessagePublié : dim. juin 13, 2010 21:58 pm 
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Inscription : mer. juin 04, 2008 21:28 pm
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Localisation : Cires les Mello
Arf .. je prends de plus en plus conscience du sort des soldats Français en 1940..une page parfois bien ignorée de l'histoire.


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 10:53 am 
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Inscription : sam. déc. 25, 2010 17:17 pm
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Bonjour,

Très émouvant et très intéressant, Eric, votre article sur le destin de l'équipage du GR I/35.

Je me permets d'ajouter les informations suivantes que j'ai trouvées dans les fonds d'archives L'Herbier-Montagnon :
L'avion était le Potez 63/11 n° 627. Ils sont partis de Mantes pour une reconnaissance de la région de Roye et retour par Chantilly où se trouvait le PC des F.A.107. Ils auraient disparu entre 5 et 7 heures du matin.
L'appareil est tombé à Roye dans l'Avre à la tannerie Derney (?) (orthographe incertaine). Le lieutenant Pierre Régis, tombé près d'un mur car certainement éjecté de l'appareil au moment du crash, a été le seul à pouvoir être identifié, les deux autres étant carbonisés. Lors de l'exhumation des corps, on parvint tout de même à identifier le sergent Prini et par déduction le sergent Mathelin.

Suite à l'examen des archives allemandes, il semble que le Potez a été la victime du feldwebel Werner Kauffmann du 4/JG 53 qui revendiqua un appareil de ce type au dessus de Roye ce même jour : 7 juin 1940. Il s'agissait de sa deuxième victoire.

Un autre appareil du GR I/35 est tombé dans la Somme le 25 mai 1940 abattu par la DCA allemande à Abbeville et s'est écrasé dans une pâture, Faubourg Thuison causant la mort de ses trois occupants : le lieutenant observateur Galy, le sous/lieutenant pilote Panebœuf et le sergent/chef mitrailleur Valette. Témoignage émouvant de cette tragédie, M. Henri de Wailly conserve la mitrailleuse arrière du Potez 63/11 qu'il a eu la gentillesse de me montrer lors de la visite de son musée qui, aujourd'hui, hélas, est fermé au public, il me semble.

Cordialement

Franck

P.S : je recherche, pour un livre, toutes les informations possibles sur le GR I/35 : photos, témoignages, etc. (CF mon message dans la rubrique l'armée française dans l'Oise, section armée de l'air sous le titre : l'histoire du GR I/35, mes bottes de 93)


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 11:50 am 
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Inscription : sam. oct. 24, 2009 10:38 am
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Localisation : Somme
Bonjour Franck,
Merci pour toutes ces précisions sur l'équipage du G.A.R. I/35 tombé à Roye ce 7 juin 1940. Seuls quelques petits détails me chagrinent.
Dans votre message, vous indiquez que vos sources sont basées sur les archives de Mme Germaine L'Herbier-Montagnon, personnage incontournable et d'un grand courage, dont le témoignage est irréprochable.
Cependant dans le cas présent, ce n'est pas elle qui permit de conclure les recherches sur cet avion Potez 63-11. A l'automne 1940, devant l'absence de nouvelles, la famille du Lt Régis délègue l'oncle du défunt lieutenant dans la région de Roye où le peu de renseignements rassemblés portent à croire que l'appareil a disparu. C'est cet oncle qui finit par découvrir la carlingue de l'appareil.
Je note que le numéro de série de l'appareil diffère. Le n° 827 est celui que donne Paul Martin dans son livre "Invisibles vainqueurs", quant à vous, vous indiquez le n° 627.
Je crois pouvoir affirmer qu'il s'agit bien du n°827. Le Commandant Desprez du G.A.R. I/35 précise à l'oncle du Lt Régis avant son départ pour la Somme le type d'avion et le n° de série : Potez 63-11 numéro 827. Mais restons prudents l'oncle du lieutenant au moment de la découverte ne put trouver le 8 de 827 sur la carlingue.
Les corps des deux compagnons du lieutenant (sergents Prini et Mathelin) ont bien été retrouvés carbonisés près de l'appareil qui a percuté effectivement l'angle de la tannerie DEMOUY rue Saint-Gilles à Roye, mettant le feu au bâtiment. Mais pas celui de Pierre Régis. Il faut imaginer la ville de Roye détruite, les rues encombrées de gravas. Personne n'a pensé à s'intéresser à cette carcasse d'avion, ni à savoir le nombre précis des membres de l'équipage du Potez.
C'est ainsi que l'oncle du Lt Régis a retrouvé après plusieurs jours de recherches l'avion de son neveu. Avec l'aide de M. Demouy propriétaire de la tannerie et de plusieurs personnes, l'avion fut sorti de l'Avre (rivière) et le corps de Pierre Régis fut découvert dans la rivière avec son parachute. Il put être identifié grâce à son alliance et sa carte d'identité miraculeusement conservée.
Inhumé dans un premier temps à Roye, il fut après guerre ramené dans son pays natal.
Je ne connaissais pas les détails sur l'aviateur allemand qui a descendu l'appareil, ni sur les corps de deux malheureux sergents PRINI et MATHELIN. Est-ce Mme L'Herbier-Montagnon qui procéda à l'exhumation des corps ? Peut-on connaître les détails qui ont permis d'identifier le sergent Prini ?
Cordialement
Eric Abadie


Dernière édition par ae80 le jeu. déc. 30, 2010 11:58 am, édité 1 fois.

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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 15:24 pm 
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re bonjour Eric,

Les renseignements que j'ai donnés viennent de fiches concernant les recherches des morts et disparus de l'Armée de l'Air et tenues par Mme Germain L'Herbier-Montagnon sans autre précision. il s'agit sans doute d'une compilation de renseignements. soit pour les autorité soit pour les familles.
Aucune mention n'est faite de recherches simplement l'état-civil, adresse et conditions de disparition de l'intéressé en l'occurrence le lieutenant Pierre Régis.
En ce qui concerne le numéro de l'avion, il est vrai qu'il y a trace nulle part dans les inventaires du GR I/35 d'un Potez 63/11 n° 627 mais par contre d'un 827 comme vous le précisez si justement.
Il n'y a malheureusement aucun prècision sur les détails qui ont permis l'identification du sergent Prini, simplement qu'il fut reconnu lors de son exhumation.
Je suppose que la tannerie que vous mentionnez n'existe plus, est-il possible tout de même de situer l'endroit ? je suppose aussi qu'il n'existe pas de photo de l'épave.

Cordialement

Franck


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 15:47 pm 
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Inscription : jeu. sept. 27, 2007 23:35 pm
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Bonjour

Trouvé un message du neveu du Lt Régis sur ce site :

http://www.histoire-genealogie.com/spip.php?article1276

Il suffirait de contacter le propriétaire de la page pour obtenir ses coordonnées...

Cordialement


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 15:56 pm 
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Inscription : ven. sept. 28, 2007 9:46 am
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Bonjour

Après consultation de ma doc je pense qu'il s'agit bien du Potez 63.11 n°827.
Paul Martin précise également que les Sergents Prini et Mathelin "furent identifiés lors de leur exhumation, au cimetière communal de Roye en présence des familles et des autorités locales[/."


Cordialement. Eric


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 16:41 pm 
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Inscription : sam. déc. 25, 2010 17:17 pm
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Localisation : Chantilly
Merci Éric pour ces précisions

Merci aussi Marc pour la piste concernant le lieutenant Régis, je vais l'exploiter.

Je viens de retrouver assez facilement d'ailleurs le fils du capitaine Jean Robert tué à Ormoy-Villers le 4 juin 1940 et qui va pouvoir me fournir des renseignements sur son père. J'en ferai profiter le site

Cordialement

Franck


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 17:23 pm 
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Inscription : sam. déc. 25, 2010 17:17 pm
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Concernant le supposé vainqueur du Potez 63/11. Supposé car il faut toujours être prudent avec les revendications allemandes d'autant que l'heure diffère mais il s'agit du seul pilote allemand revendiquant un Potez 63/11 ce 7 juin 1940 de plus sur Roye, il s'agit donc du Feldwebel Werner Kauffmann du 4/53, il totalisa 7 victoires avant d'être porté disparu le 11 novembre 1940.

Cordialement

Franck


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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 19:00 pm 
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Inscription : jeu. sept. 27, 2007 22:28 pm
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FGPoir a écrit :
Concernant le supposé vainqueur du Potez 63/11. Supposé car il faut toujours être prudent avec les revendications allemandes ...


Ne soyons pas manichéen ave le décompte des victoires allemandes, l'armée de l'air française et aussi alliée n'ont rien à envier. Mais c'ets un autre débat. :wink:

_________________
Frédéric - co-administrateur du site et forum "Picardie 1939 - 1945"
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MessagePublié : jeu. déc. 30, 2010 19:06 pm 
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Re-bonsoir,
Je suis le parcours de ce Potez 63-11 et de son équipage depuis plusieurs années. Je prépare un ouvrage sur Roye pendant la période 1939-1945 et c'est tout naturellement que je me suis penché sur le destin de ces aviateurs.
Voilà quelques mois j'ai réussi à entrer en contact avec le neveu du Lieutenant Pierre Régis qui m'a très cordialement indiqué l'adresse de son cousin, fils de Pierre Régis. J'ai donc été en relation épistolaire avec lui. Il était très touché que quelqu'un pense encore à son père après tant d'années.
Actuellement, je suis entrain de prendre contact avec le Souvenir Français et la municipalité de Roye pour voir s'il ne serait pas possible d'apposer une plaque à l'endroit, le plus proche possible, où l'avion a percuté le sol. Dans les années 1990, le comité du Souvenir Français de Montdidier sous la présidence de Jean-Pierre David avait érigé plusieurs plaques comme à Remaugies, Davenescourt ou encore Assainvillers, afin de créer une sorte de chemin du souvenir. C'est dans cet esprit que j'essaie de voir si la même chose est posssible à Roye.

Je joins le texte d'une plaquette dédiée à cet équipage qui montre le sacrifice de ces trois aviateurs. Il faut prendre évidemment du recul avec la fin du récit car nul ne peut témoigner objectivement des derniers instants des aviateurs et du Potez en ce matin du 7 juin 1940.

Cordialement
Eric Abadie

In Memoriam

Pierre REGIS
Mort pour la France

C'était une force de la nature une sorte de faucon à l’œil perçant, au corps agile, à la décision rapide et d'une sûreté d'action merveilleuse. La mer, la montagne n'avaient pour lui que des appels : toute crainte lui était parfaitement étrangère. En société il en était de même. Tel il était lorsque je l'ai connu : ce n'étaient que les étincelles d'un feu, que la guerre devait rendre éblouissant. La jeunesse d'un héros ne fait-elle pas souvent deviner ce que l'homme sera plus tard ?
Son service militaire fut retardé du fait d'un terrible accident dû à son audace et qui faillit lui coûter un bras. On l'ajourna, on l'aurait même réformé sans son insistance. Il avait trop pratiqué l'aviation pour ne pas choisir cette arme à laquelle tous ses instincts le conviaient ; mais c'est comme observateur et non comme pilote, comme il l'eût désiré, qu'il servit en 1939 ; c'est d'observateurs que l'on manquait surtout.
On sait l'inaction dans laquelle se passèrent les premiers mois de cette guerre ; et les exercices préliminaires auxquels on se livrait à l'arrière, se faisaient sans le matériel suffisant. Brusquement rappelé de permission, comme tant d'autres, lors de l'invasion du 10 mai, il commença par une reconnaissance en terrain ennemi, où sa carlingue reçut un obus qui, par chance, n'éclata pas, et dont il revint sain et sauf avec les clichés désirés.
Puis c'est un épisode autrement tragique : dans le repli général, la préservation sous les bombardements célestes, à Mantes, de tout le personnel et de tout le matériel aérien possible, menacés d'anéantissement. Le calme et le sang-froid furent à la hauteur du courage, car cette âme ardente savait conserver à l'occasion le flegme d'un tempérament tranquille.
Des citations bien naturelles reconnurent en lui ces rares qualités. Mais voici la journée épique, celle où nous devons laisser la parole au rapport de son frère Jacques Régis : «Puis vint l'aube du 7 juin. Equipage d'alerte de nuit sur le terrain ; ils sont commandés pour aller survoler la région de Roye où les blindés allemands semblent opérer une concentration massive. Il s'agit de survoler les lignes à basse altitude, de s'enfoncer au-dessus du secteur de Roye pour dénombrer au ras du sol, dès le point du jour, les unités ennemies qui se préparent à l'offensive. Le renseignement est urgent, on a demandé un équipage d'élite qui, la mission remplie, doit se diriger à toute vitesse vers Chantilly où se trouve le G . Q. G., y jeter un message qui sera attendu depuis l'aube sur une pelouse balisée à cet effet, afin que le résultat soit connu directement et sans retard, puis rejoindre le terrain.
Avant l'aube, ils mettent les moteurs en route, mais l'un d'eux refuse de partir, tous les efforts sont vains, une demi-heure est perdue ainsi. Pierre, voyant que l'heure passe et de précieuses minutes perdues, fait avancer un autre appareil dont les moteurs partent bien. Le temps de les chauffer et de décapoter l'appareil, de le débarrasser de son camouflage nocturne, encore une demi-heure de perdue.
Le jour n'est pas loin maintenant et le risque de la mission augmente à chaque minute, car la chasse ennemie prend l'air dès le lever du jour et Pierre sait qu'il n'aura pas de chasse française pour le protéger ; enfin l'appareil est prêt, calmement il donne l'ordre du départ. L'appareil roule, accélère sa course, puis bascule et s'effondre dans un trou de bombe mal comblé, du bombardement de l'avant-veille, écrasant son train d'atterrissage dans la profonde cuvette.
On se précipite, l'appareil est remorqué hors de piste pendant que les mécaniciens s'affairent à préparer un troisième Potez. Il fait presque jour maintenant et, quand ce dernier est prêt, c'est dans la clarté du soleil levant que l'équipage décolle en trombe. Mais hélas ! les minutes perdues vont leur être fatales. Ceux qui sont restés sur le terrain et qui savent le terrible danger que ce retard leur fait ,courir, ont le cœur serré.
Dans l'émotion de ces minutes tragiques, Pierre reste toujours d'un calme serein, comme il va le rester un peu plus tard dans un ciel de bataille. En effet, l'appareil fonce maintenant à 350 km. à l'heure vers Roye. Mais il fait grand jour ; le bimoteur essaie de se faufiler à basse altitude et aborde les lignes ou ce qu'il en reste, car la percée -allemande a disloqué notre front depuis quelques jours. Mais là-haut, les Messerschmitt qui veillent, ont vu l'appareil et une nuée de chasseurs ennemis foncent de plusieurs milliers de mètres. S'échapper, il n'en est pas question, bien qu'ils aient une chance en faisant demi-tour tout de -suite ; mais il y a la, mission. Alors ils continuent et leurs malheureux 350 km. sont submergés par les chasseurs ennemis qui foncent en piqué à plus de 600 km. à l'heure. Ils sont au-dessus de Roye. Le mitrailleur d'arrière, Mathelin, un as du tir, plein de calme et de sang-froid, tire, tire sur les Messerschmitt qui le mitraillent par derrière. Il en abat un. Mais ils sont vingt, et plus peut-être, et les Français sont touchés. L'appareil prend feu. Mathelin, certainement, a été tué dès le premier engagement.
L'appareil pique au sol, poursuivi par les chasseurs, mais l'équipage de Pierre n'a pas dit son dernier mot. Quel est celui qui reste vivant à bord ? Est-ce Prini, le pilote sûr et adroit ? Est-ce Pierre lui-même qui, avec la double commande, aura tenté l'ultime manœuvre ? On ne le saura jamais. Quoi qu'il en soit, un témoin oculaire de qui nous tenons ces détails, nous dit : «ils semblaient s'abattre, l'appareil flambait ; tout à coup, ils redressèrent dans un dernier sursaut et firent feu de leurs mitrailleuses d'avant sur un appareil allemand trop imprudemment rapproché et l'abattirent, puis le Potez piqua et s'écrasa sur les bords de l'Avre, aux portes de Roye».
Et c'est là, plus de quatre mois après, le 18 octobre, que par les soins d'un oncle affectionné, M. Emile Régis, le corps de Pierre fut retrouvé, la face contre terre et les bras en croix. La veille de sa mort, il avait communié dans la cathédrale de Chartres.

Gabriel Ancey.


CITATION A L'ORDRE DE L'ESCADRE AERIENNE

«REGIS (Pierre), lieutenant, groupe de reconnaissance 1/35 : officier observateur, calme et réfléchi. A accompli brillamment le 27 mai -1940 une reconnaissance à basse altitude dans les lignes ennemies. Bien que son avion ait été endommagé par les tirs de la D.C.A. ennemie, a continué sa mission jusqu'au bout, ramenant les renseignements les plus précieux.
Cette citation comporte la croix de guerre avec étoile de bronze».

Extrait du JOURNAL OFFICIEL du 8 Mars 1941

«REGIS (Pierre), lieutenant, groupe de reconnaissance 1/35 : officier observateur calme, courageux et sûr. A fait preuve des plus belles qualités d'activité réfléchie et de cœur, notamment au cours du bombardement aérien du terrain de Mantes, le 3 juin 1940. Tombé glorieusement au champ d'honneur, le 7 juin, au cours d'une reconnaissance aérienne à l'intérieur des lignes ennemies. Déjà cité.
Cette citation comporte l'attribution de la croix de guerre avec palme.»


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MessagePublié : lun. janv. 03, 2011 16:28 pm 
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Inscription : sam. déc. 25, 2010 17:17 pm
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Bonjour Eric,

Tout d'abord meilleurs vœux pour la nouvelle année.

Est-il possible que vous me communiquiez les coordonnées du fils du lieutenant Pierre Régis ?

Cordialement

Franck Poiré


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MessagePublié : lun. janv. 03, 2011 20:03 pm 
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Inscription : sam. oct. 24, 2009 10:38 am
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Localisation : Somme
Bonsoir Franck,
Merci pour vos bons voeux recevez les miens en échange.
J'ai contacté le fils du Lieutenant Pierre Régis par courriel. Vous comprendrez que je ne puisse donner son adresse sans son accord.

Cordialement
Eric Abadie


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